M&T / 45 compagnies aériennes françaises et internationales sont membres de BAR France. De quelle manière cette association née en 1949 défend-elle leurs intérêts ? Son rôle est-il d’abord celui d’un réseau lobbyiste ?
B.A.R. France représente actuellement 56 membres et à travers les différents groupes (hors alliances), environ 110 compagnies aériennes. Il serait réducteur d’associer BAR à un groupe de lobbyistes, notre mission consiste avant tout à représenter tous les acteurs de l’aviation commerciale dans les diverses activités qui constituent notre industrie. A titre d’exemple, B.A.R. France siège dans toutes les instances régissant, sous l’égide de la Direction Générale de l’Aviation Civile, ainsi que dans tous les groupes de travail se rapportant aux relations économiques et industrielles ainsi qu’environnementales avec toutes les parties prenantes des entités œuvrant dans notre sphère d’activité. A ce titre BAR France est un membre actif dans les commissions économiques du Budget annexe de l’aviation civile ainsi que celles des aéroports parisiens (ADP) et de Nice, Toulouse et Bordeaux.
Notre organisation représente également ses membres dans les commissions environnementales d’Orly et de Charles de Gaulle ainsi qu’auprès de l’Autorité contre les nuisances sonores aéroportuaires. Elle participe aussi aux travaux de la Commission administrative de l’Aviation Civile et de la Commission consultative des aéroports français et du COHOR organisme chargé de la régulation des créneaux horaires. Par ailleurs BAR France occupe en la personne de son président, Jean-Pierre SAUVAGE, un siège au sein du Conseil Supérieur de l’Aviation Civile.
Eu égard au caractère international de notre organisation, nous assumons toutes fonctions en relation permanente avec IATA ainsi que les autres B.A.R., Européens mais également internationaux (Australie, Nouvelle Zélande, Canada, Afrique du Sud entre autres)
M&T / En aucun cas, vous ne vous mêlez de questions commerciales ?
Jamais ! Ceci est interdit par nos statuts et fait partie de notre code d’éthique.
M&T / Est-ce que depuis la crise, les compagnies ont vraiment retrouvé des niveaux d’activité élevés ? Qu’est-ce qui fait que certaines s’en tirent mieux que d’autres ?
Pour la plupart oui. La seule baisse notable concerne le trafic domestique pour des raisons que nous connaissons tous. Pour ce qui est du transport international qui concerne la plus grande patrie de nos membres, il est notable d’observer un niveau de trafic revenu aux chiffres ante Covid avec des perspectives positives pour le futur.
M&T / A quoi va ressembler le ciel dans une décennie ?
Les projections de trafic faites par IATA démontrent une appétence sans frein du public pour le transport aérien et il importera pour tous les acteurs de savoir s’adapter aux contraintes environnementales pour une acceptabilité de notre mode transport notamment en matière de consommation énergétique. Tant les instances internationales et européennes que les constructeurs et motoristes œuvrent activement pour accomplir les objectifs fixés en la matière et assurera ainsi la pérennité du transport aérien dans le monde.
A la lueur des données statistiques de IATA nous observons actuellement une expansion du trafic intra-asiatique, transpacifique et la prochaine explosion sera le fait du sous-continent indien, non seulement domestique mais aussi de et vers l’Inde et les pays limitrophes. La révolution suivante viendra probablement d’Afrique où les besoins sont immenses et les infrastructures nécessiteront beaucoup de développement. Cependant, ne négligeons pas les plus grandes masses de l’aérien : 1/ l’Europe, 2/ L’Amérique du Nord. Même si nous assisterons probablement à un glissement vers des solutions alternatives au transport aérien dans les années à venir, l’avion restera la seule solution viable pour la majorité des déplacements « medium-haul » et « long-haul ».
M&T / Beaucoup de compagnies contestent la stratégie des aéroports, notamment ceux contrôlés par ADP. L’autorité de régulation des transports a fait des recommandations pour améliorer le cadre de régulation des plateformes françaises. En quoi ces recommandations sont-elles pertinentes ? :
La DGAC a lancé très récemment une large consultation auprès des acteurs du transport aérien en vue de modifier certains aspects de la régulation économique afin d’arriver, dans l’optique de la concrétisation de Contrat de Régulation Economique (CRE), à établir un équilibre et un consensus sur les termes économiques dans le cas des aéroports éligibles (plus de 5 millions de passagers), supervisés et approuvés par l’Autorité de régulation des transports (ART).
M&T / Les compagnie sont-elles aussi vertueuses qu’elles le prétendent en matière de réduction des émissions de CO2 ? La taxation à répétition est-elle une réponse à la hauteur de la part de l’Etat ?
Madame Borne, notre ancienne Première Ministre après avoir également exercé les fonctions de ministre des Transports, n’a-t-elle pas déclaré que la taxation ne peut pas régler la question environnementale et nous ne pouvons qu’être d’accord avec cette affirmation … Les compagnies, conscientes de leur obligation de réduire les émissions gazeuses, travaillent sans répit avec les constructeurs et motoriste pour disposer de matériels répondant à cet objectif vertueux Cependant il est impératif pour ce faire de développer rapidement la production du carburant d’aviation durable et à un prix compétitif pour réussir le challenge du zéro carbone en 2050. Et en parlant de taxation, le transport aérien est le seul mode de transport à couvrir l’intégralité de ses infrastructures. Il n’en reste pas moins que les obstacles sont nombreux et surtout les modes alternatifs restent à développer, et donc vont nécessiter des moyens importants pour les études et le développement des nouvelles motorisations et des modes d’énergie différents.
Le transport aérien a été le premier – et à ce jour le seul – à avoir mis en place des normes au niveau mondial (CORSIA, FIT for 55, ETS, SAF…) et être engagé au plus haut niveau vers un objectif commun de réduction de CO2.
M&T / L’hydrogène ou l’électricité sont-ils-les deux carburants du futur ?
L’utilisation de l’électricité a montré ses limites pour être une réelle alternative au carburant dans un avenir proche.
Pour ce qui est de l’hydrogène les perspectives sont un peu plus prometteuses mais si l’on se réfère à ce qu’a déclaré le président d’Airbus il est possible d’envisager un avion de 100 places propulsé par ce type énergétique à horizon 2035, ce qui limite bien évidemment les possibilités de connectivité avec ce type d’avions.
Dans un cas comme dans l’autre, le poids des batteries et/ou des unités de refroidissement sont des handicaps à l’évolution.
Le SAF (ou CAD) reste donc à ce stade l’option la plus réaliste pour l’intercontinental et le moyen-courrier européen.
N’oublions pas que l’aviation n’a qu’un peu plus d’un siècle d’existence et de nombreuses découvertes restent à venir.
M&T / Faut-il croire au retour des supersoniques ? Paris Tokyo en deux heures, est-ce crédible ? Est-ce souhaitable ?
Le retour des supersoniques est possible au vu des capacités technologiques actuelles. Plusieurs bureaux d’études travaillent actuellement sur le sujet et certains projets ont été dévoilés.
Est-ce souhaitable ? Il est trop tôt pour répondre et les marchés se positionneront en fonction des aspirations des clients, aspirations couvrant les besoins réels en transport, mais aussi au vu du « coût » environnemental et des besoins en ressources.Se posera inévitablement la question de la rentabilité