M&T / Quel bilan faites-vous de l’activité touristique en Ile-de-France en 2021 ?
Ce bilan est forcément meilleur qu’en 2020, ce qui n’est pas très compliqué, mais avec une particularité, c’est que le premier trimestre 2020 était en progression par rapport à 2019 avant que la planète s’arrête le 17 mars. Ceci posé, nous avons accueilli près de 23 millions de visiteurs en 2021, ce qui représente à peine la moitié des 50,6 millions de 2019, mais nous sommes tout de même à + 30 % par rapport à 2020. Nous savons que l’activité a véritablement démarré à l’été 2021, que les Américains et les Européens y ont beaucoup contribué en loisir alors que le tourisme d’affaires a souffert un peu plus. Nous pouvons espérer que 2022 se présente mieux même si de gros salons sont reportés, ce qui va sûrement impacter les chiffres du premier trimestre.
M&T / Quelles sont les premières tendances justement pour 2022, en loisir et en affaires ?
Nous n’avons pas les chiffres en temps réel, mais nous savons qu’en matière de tourisme de loisirs, dès que les frontières rouvrent, les touristes reviennent plus facilement. Ce sera plus lent pour le tourisme d’affaires, avec en particulier le segment Mice, les rendez-vous dans la capitale étant moindres tout comme les incentives ou les séminaires. Pour preuve, sur ce marché du tourisme d’affaires, le nombre d’arrivées a été de 5,7 millions en 2021, c’est-à-dire 14 % de plus qu’en 2020, mais 65 % de moins qu’en 2019.
M&T/ Les marchés de proximité ont-ils permis de limiter les pertes en 2021. Le marché français a-t-il été au rendez-vous ?
Sur les 23 millions de visiteurs que l’Ile-de-France a accueillis en 2021, 70 % étaient Français. Ce qu’il convient de noter, c’est que depuis l’été 2020 et la fin du premier confinement, on est passé d’un rapport de 50/50 entre la clientèle française et internationale à 70/30. Pour ce qui concerne les 6,7 millions de visiteurs étrangers, nous avons fait beaucoup de communication et de promotion sur les marchés frontaliers – Espagne, Italie, Belgique, Allemagne, Suisse – car les contraintes étaient moindres pour venir en France. Sur les marchés lointains, même si l’accès à notre pays était possible pour certains, les ouvertures et fermetures à répétition ont été un frein pour programmer un séjour.
M&T / Si les Américains sont revenus, les Asiatiques sont encore absents. Croyez-vous au retour de cette clientèle en 2022 ?
Le marché asiatique est aujourd’hui fermé, les Chinois et les Japonais ne sont pas autorisés à venir. En revanche, certains marchés s’ouvrent comme l’Australie et quelques destinations du Sud Est asiatique. Logiquement, nous visons en 2023 un retour à peu près normal de cette clientèle, mais certains sont plus optimistes, des tours opérateurs et des agences réceptives avec qui j’échange régulièrement me disent qu’à priori l’ouverture peut être réelle dès cet été, même pour la Chine. Pour le reste du monde, le marché russe est freiné par la non-reconnaissance par l’Europe du vaccin Spoutnik et évidemment par la situation géopolitique qui s’est fortement dégradée. En ce qui concerne le Moyen-Orient, classé en vert, la clientèle est bien présente et l’on a vu que l’hôtellerie haut de gamme a bénéficié d’une bonne fréquentation en provenance de cette zone durant l’été dernier et en fin d’année.
M&T / Cette crise doit-elle conduire à revoir le modèle touristique de la région ? Accueillir 50 millions de visiteurs comme en 2019 est-il raisonnable ?
Le Comité Régional du Tourisme a des plans d’action qui découlent du Schéma régional du développement du tourisme et des loisirs – le SRDTL – adopté par le Conseil Régional. Nous sommes arrivés le 31 décembre 2021 à la fin du précédent schéma et nous sommes entrain de travailler à l’élaboration du prochain qui devrait être voté le 19 mai par le Conseil Régional et couvrir la mandature jusqu’en 2028. Il y a quelque chose que le covid a accéléré, c’est la nécessité d’offrir une meilleure expérience client, notamment par la régulation des flux. J’entends une résonnance sur le sur-tourisme en Ile-de-France qui je l’affirme n’existe pas. Ce n’est parce qu’il y a parfois une file d’attente à l’entrée des sites franciliens les plus visités qu’il y a un quelconque sur-tourisme à Paris. Pour autant, nous travaillons sur la régulation des flux, de manière à ce que les visiteurs – 80 % sont déjà venus dans la région – puissent être orientés vers de nouvelles découvertes à Paris et surtout à l’extérieur. Pour ce qui est du tourisme d’affaires, nous avons compris qu’il fallait que l’on aide la mise en relation de l’offre avec la demande. Nous allons lancer en avril une plateforme digitale où l’on pourra mettre autour d’une table digitale l’offre – laquelle peut aller de l’hôtel à l’espace et jusqu’au traiteur – et la demande des clients. En se rendant sur cette plateforme, une société qui cherche des informations pour faire un incentive, un séminaire ou un congrès va voir ce qui est disponible et obtenir rapidement des devis, ce qui permet de simplifier la démarche de recherche. Du coup, cela aide les clients, mais aussi et surtout les acteurs du Mice qui ont terriblement souffert durant la crise. Nous songeons évidemment aux grandes chaînes hôtelières, mais ils y les traiteurs et le secteur de l’évènementiel qu’il faut soutenir.
M&T / L’Etat a justement soutenu les professionnels du tourisme et de l’évènementiel durant la crise. Comment le CRT est-il intervenu auprès des acteurs du secteur ? L’Etat vous a-t-il accompagné à l’heure de la relance ?
L’Etat a aidé comme partout en France chaque acteur du tourisme et la Région a mobilisé énormément de moyens pour les acteurs franciliens, ce qui a permis de sauver de nombreuses entreprises individuelles. Est-ce que l’Etat aujourd’hui aide la relance de la destination Paris ? Pas pour l’instant, mais nous gardons espoir et travaillons avec Atout France pour construire un plan de relance pour la destination. Pour sa part, le CRT a fléché toutes les aides que la région a mis en place pour les entreprises du tourisme, de la restauration et de l’hôtellerie. A notre niveau, nous avons soutenu la formation sur le digital, nous avons fait de la promotion et de la communication et nous avons monté le dispositif Safe Destination qui a permis de communiquer sur les mesures et protocoles mis en place pour garantir à notre clientèle qu’elle pouvait sereinement organiser des évènements en Ile-de-France.
M&T / Sur le segment du Mice, avez-vous ou allez-vous lancer des campagnes de promotion sur les principaux marchés émetteurs ? Avec quels messages ?
Outre la participation à des salons tels IMEX Frankfurt où nous serons exposants en mai prochain aux côtés de l’Office du Tourisme et des Congrès de Paris, et IMEX America, nous continuons à communiquer auprès des entreprises grâce à une newsletter qui permet de soutenir cet éco-système. De plus, nous sommes entrain de travailler sur l’accroche dédiée au Mice, sachant que notre accroche commune loisirs et affaires sur la destination qui s’appelle ParisYours a été déclinée en ParisOpen et en ParisBusiness pour ce segment affaires.
M&T / La clientèle corporate et Mice a largement fait défaut en 2021. Vous attendez-vous à un réel rebond en 2022 ?
Nous l’espérons. Logiquement, 2022 sera meilleure que les deux années précédentes, mais ce sera plus long et plus compliqué que pour le secteur des loisirs. Quand retrouverons-nous des chiffres équivalents à ceux de 2019 ? Bien malin qui pourrait le dire ! Mais nous allons tout mettre en œuvre pour aider ce secteur qui génère la moitié des retombées économiques de la région.
M&T / 2024 et les jeux Olympiques, c’est demain. Comment anticipez-vous ce rendez-vous ? En quoi ces Jeux sont-ils importants pour le tourisme francilien ?
Les Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 sont très importants pour la visibilité de la destination. En termes de tourisme, nous comptons aussi beaucoup sur France 2023 – la Coupe du Monde de Rugby – qui dure un mois et demi contre 15 jours pour les jeux Olympiques et qui va attirer de nombreux touristes en provenance de zones lointaines, l’Australie, la Nouvelle Zélande et le Japon notamment. Lesquels vont séjourner à minima six à sept semaines et qui vont visiter notre destination, mais également les autres régions.
M&T / Qu’est-ce que vous avez envie de dire aux organisateurs de congrès, de séminaires ou d’incentives pour les convaincre de revenir à Paris ?
J’ai envie de leur dire que nous restons la première place de marché européenne pour le tourisme d’affaires, que l’infrastructure est là, que les acteurs de l’évènementiel sont opérationnels, que la destination est safe et qu’aujourd’hui nous avons amélioré l’expérience clients. Comme nous le disons depuis l’été dernier : ParisOpen ! Le Mice est plus qu’une priorité, je l’ai dit, il représente la moitié des retombées économiques de la région, mais c’est le segment qui va être le plus long à retrouver les volumes d’affaires que nous avons connus avant le covid.